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[M-E 001] The experience > Insight

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Message  Kaptendonc Jeu 26 Mai - 1:12

THE EXPERIENCE
“Insight”

Gema / NTP 1999
Style: Dark-Prog-Metal

[M-E 001] The experience > Insight Insgh5ka

Le nom de ce groupe ne vous dit sans doute rien, et le titre de l’album encore moins, c’est pas grave, ce sont des choses qui arrivent. En ce qui me concerne, c’était juste l’atmosphère de la pochette qui m’avait donné l’intuition qu’il devait sûrement y avoir quelque chose de bien à l’intérieur, et croyez-moi, ce fut vraiment une très très bonne intuition. Apparemment j’ai été le seul à l’avoir eue, vu l’insuccès du groupe et la disparition de son oeuvre dans la misère des bacs de soldes les plus crasseux. Mais il n’est pas difficile d’expliquer pourquoi presque personne n’a osé faire l’effort auditif de s’aventurer très loin dans l’univers de cet album : les amateurs de Prog ont dû s’enfuir dès le début en entendant la voix sombre et compulsive qui laboure le paysage sonore comme un train à vapeur sorti de ses rails, les fans de gothic-dark ont dû être pulvérisés par les premières salves de guitares aux déflagrations aussi tonitruantes qu’imprévisibles, et les metalleux purs et durs ont dû s’endormir à l’arrivée d’un break planant lorsqu’ils ont senti qu’il y avait une flûte dans les parages. Et voilà comment on tombe en quelque sorte entre trois chaises. Autant dire que The Experience ne s’est jamais remis de sa chute. Dommage, car ce jeune groupe allemand faisait preuve d’une belle audace créative et de beaucoup de fermeté pour gérer avec précision cette longue alternance de moments de calme brumeux et de gigantesque fureur qui caractérisait son second album. On pourrait faire une comparaison facile avec Opeth, Evergrey, ou Pain of Salvation, mais on sent bien que ce n’est pas tout à fait la même famille, ni le même territoire, comme si le groupe avait pris des chemins de traverse pour arriver à ce résultat, ou s’était forgé son style à partir de matériaux inconnus ailleurs. Et en ce sens ils ont bien choisi leur nom, qui évoque toutes sortes de secrets de laboratoires, d’éprouvettes renversées, de calculs démentiels et de journées de travail bien remplies. De nuits blanches aussi, à n’en pas douter.

Il y a des expériences qui ne donnent aucun résultat spectaculaire, ni bombe à neutrons, ni vaccin contre la grippe, ni fil à couper le beurre. Il y en a d’autres qui engendrent des substances classées trop instables, des armes décrétées trop dangereuses, ou des appareils dont le fonctionnement est jugé trop compliqué pour en permettre la fabrication à grande échelle. “Insight” pourrait être tout cela à la fois, ce qui rend évidemment son approche délicate, mais non dépourvue de surprises ni de sensations fortes. Il est évident qu’on ne peut pas se contenter d’écouter un seul morceau, et encore moins l’isoler du reste, car tout fait bloc avec une étonnante homogénéité. Les passages lents, nus et lisses, où la texture sonore se limite au désenchantement d’une flûte solitaire et aux vertiges astraux d’une guitare à la Pink Floyd, sont chargés d’une tension énorme qui succède toujours à des instants de violence culminante et fragmentaire, dont les grondements viennent mourir dans l’étau d’une immobilité plombée. Un peu comme si quelqu’un était enfermé dans une chambre exiguë et se cognait la tête contre les murs avant d’abdiquer subitement, annéanti par la prise de conscience de sa situation irréversible, bien plus que par la douleur. Ce sentiment de rage impuissante émane essentiellement de la voix du chanteur, qui lorsqu’elle se réduit à un murmure, atteint une profondeur quasi-religieuse, mais dégage aussi une très grande tristesse. Les textes eux-mêmes, sans être forcément dépressifs, sonnent plutôt comme une sorte de méditation tourmentée qui anesthésie le corps et met l’âme au supplice : “Can’t find the key to my innerself, can’t free my mind to help myself...”, et les multiples bifurcations dans le développement de l’oeuvre illustrent parfaitement cette errance existentielle dont la mécanique fragile s’use jusqu’à l’intolérable.

Il n’y a pourtant ici rien de malsain, ni de macabre, ni de morbide, et à l’inverse de certains groupes extrèmes qui cherchent systématiquement à déstabiliser l’état mental de l’auditeur en comblant la vacuité de leurs compositions soit par des éffets répulsifs d’une brutalité ultra-naïve, soit avec les archétypes révolus d’une mélancolie suicidaire oportunément aseptisée, The Experience est parvenu, sans excès ni esbroufe, à installer sa tragédie musicale dans un décor certes sombre, mais percé d’ouvertures où la lumière pénètre et s’installe à son propre rythme, avec une sensualité minutieuse et frémissante semblable au pinceau d’un aquarelliste aveugle. Ainsi les sons viennent tout naturellement se substituer aux ombres, tandis que le silence humide se charge de les diluer dans une gamme de teintes assourdies et neutralisées par la persistance de la nuit, dégringolant parfois brusquement dans les inexplorables terriers d’une perpétuité claustrophobe, engloutissant simultanément l’image consolatrice de ce qui pourrait ressembler le plus à un lendemain. En effet, le cours du temps lui-même paraît avoir suspendu sa progression en atteignant la frêle ballustrade qui surplombe l’abîme de cette insomnie houleuse, dont l’effervescence décale constamment l’arrivée de l’aube et ne la rend perceptible qu’à travers la fusion brouillée du doute, de l’espoir-qui-s’envole, et d’une affliction au-delà de toutes les plaintes. De ce moment de désarroi congelé, d’inquiétude en bocal, de stupeur sous vide, il ne nous est donné à voir (à entendre) qu’un “insight”, un aperçu, mais son impact émotionnel, amplifié par l’énergie qui s’y concentre, peut résonner indéfiniment, et à un volume que l’inconscient a règlé au maximum afin de rendre audible ce qui ne pourait être qu’un improbable miracle, tel celui du supposé bruit-de-la-mer à l’intérieur d’un coquillage: y coller son oreille est l’acte le plus innocent du monde, presque un réflexe, mais cette fois on est en droit d’affirmer qu’il s’agit réellement d’une Experience, à tenter, à retenter souvent.
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